Pour
avoir rencontré récemment un footballeur professionnel qui me faisait remarquer
être gaucher mais « vrai gaucher » ! Je me suis intéressé à la
pertinence de ce caractère d’autant qu’avec sa compagne gauchère (et ambidextre) ils ont une petite fille droitière, fort intelligente
mais qui a 7 ans et demi n’avait pas mis en place la lecture courante.
Jusqu’à
présent, nous distinguions les droitiers (65%) des gauchers, les « vrais
gauchers » (10%) comme Léonard de Vinci ou Esher, les ambidextres (25%)
[1]. Mais parler de « vrais gauchers » renvoie à l’idée
qu’il existerait de « faux
gauchers », pourquoi pas alors de « faux droitiers » ?
Pour
ma part en prenant en compte les travaux remarquables de Monica Baciu [2] qui a
montré que l’on pouvait facilement changer d’œil directeur suivant le contexte,
je vais m’intéresser à l’organisation des entrées sensorielles en lien avec
les hémisphères contraposés. Je m’intéresserai seulement aux personnes
présentant un profil homolatéral : droitiers lisant avec leur œil droit,
oreille droite dominante et pied droit et inversement pour les gauchers. Pour
ces personnes l’hémisphère prépondérant est naturellement l’hémisphère contraposé.
Chaque
hémisphère a une fonction spécifique que l’on peut simplifier en les qualifiant
d’hémisphère du détail HD et
d’hémisphère du global HG. L’HD contient entre autre le module de
lecture que l’on appelle la boîte aux mots :
1°
le producteur de phonèmes dans le gyrus frontal,
2°
l’analyseur de mots dans le parieto-temporal,
3°
le détecteur automatique de mots dans l’occipito-temporal.
Lorsque
les mots sont assemblés bout à bout par un jeune lecteur, l’ensemble est envoyé
via le corps calleux dans l’hémisphère opposé HG pour y trouver le sens de la phrase. L’apprentissage de la
lecture est propre à l’Homme et l’organisation de cette activité mentale est apte
à nous révéler les différents schémas d’organisation des entrées sensorielles.
Nous
savons avec les différents moyens récents d’imageries du cerveau,
principalement avec les IRMf (dite fonctionnelle) que cette boîte aux mots
s’active généralement dans l’hémisphère
gauche mais parfois dans l’hémisphère droit. Certains auteurs parlent d’une
répartition 95% - 5% ; C'est-à-dire que 95% de la population voit son
hémisphère du détail situé à gauche (le repérage gauche/droite étant le même
que lorsqu’on parle de bras gauche ou de bras droit…) Ces chiffres n’ont pas
une importance absolue mais ils disent que généralement pour un droitier
l’hémisphère HD est habituellement
situé à gauche et que pour un « vrai gaucher » son HD est à droite.
On
a donc deux possibilités de mise en place :
HD---HG ou HG---HD (les traits --- symbolisant le corps calleux)
Comme
les connexions pour les mains, les oreilles, les narines et les pieds sont
inversées puisque par exemple la main droite est commandée par l’hémisphère
gauche nous pouvons dire qu’il y a 4 possibilités de carte d’organisation des
entrées sensorielles, à savoir
Concernant
la vue, chaque œil dispose de deux hémi-champs chacun relié également à
l’hémisphère opposé, nous avons un œil dominant certes mais il est facile d’en
changer [2] , nous pouvons appréhender le monde avec l’œil gauche et lire avec
l’œil droit comme je l’ai découvert chez une petite fille de 6 ans qui tournait
légèrement la tête pour mettre en place la lecture de l’œil droit suivant le schéma
(1).
Si
l’on part du constat qu’il y aurait 10% de vrai gaucher, on peut raisonner
ainsi sur la répartition des 4 cartes d’organisation des entrées sensorielles
prédominantes du cerveau
Le
schéma (4) qui correspond aux faux gauchers est de fait très rares (0.5%). Ces
personnes cumulent les handicaps, la main et le pied dominants ne possédant pas
l’agilité ni la motricité fine utile dans de nombreux exercices de graphisme ou
d’adresse en sport. Ce sont des gauchers maladroits.
Les
vrais gauchers qu’ils soient peintres, auteurs ou sportifs de haut niveau ont
des compétences reconnues et ont très souvent des capacités motrices
supérieures aux droitiers. Les travaux sur ce thème ne manquent pas.
Noémie*, la petite fille qui ne savait
pas lire en CE1.
Rien
de plus banal qu’un enfant dans le système scolaire français qui déchiffre avec
difficulté la lecture à 7 ans et demi en CE1 ! Sans doute mais Noémie a eu
jusque là un parcours plus qu’étrange : Toute petite, elle construit son
propre langage et parle donc une langue étrangère à ses parents ! Pourtant
ceux-ci s’expriment parfaitement en français et ont un niveau d’étude
supérieur. Elle a construit un langage comme le font certains jumeaux pour
communiquer entre eux. Une orthophoniste avisée réussira à mettre en place le
français. Cette petite fille retient les discours, les sons, les histoires et
n’a des vraies relations qu’avec les adultes. Très sportive, elle bouge sans
arrêt ce qui génère des troubles de l’attention. Ses dessins sont pleins
d’histoires d’extra terrestres et d’imagination. Cette petite fille appréhende
le réel par des entrées sensorielles suivant le schéma (2), elle écrit de la
main droite, vise avec son œil droit, lis avec le même œil, répond spontanément
au téléphone en écoutant de l’oreille droite et tape les balles de son pied
droit. Elle est homolatérale droit mais l’hémisphère contraposé est
l’hémisphère du global, celui qui lui donne toutes ses qualités : la
musicalité (sans le solfège) la créativité, l’imagination, la fantaisie, la
mémoire visuelle des visages, le langage gestuel, le sens de l’espace, la
coordination motrice mais aussi ses défauts : pas de notion du temps et
surtout cette difficulté majeure à appréhender la lecture et l’orthographe.
C’est l’HD qui compte le temps, lorsqu’on
travaille dans l’HG on ne voit pas le temps passer ! Mais c’est surtout la
lecture qui située dans l’HD n’est pas atteinte directement, sauf par un long
aller-retour via le corps calleux. Rien de mieux pour conduire à la dyslexie.
Lorsque
je l’ai rencontrée la première fois, elle n’a pas cessé de bouger pendant 2
heures !
Comment
les hémisphères communiquent par le corps calleux ?
Tout
simplement comme deux personnes qui s’appellent au téléphone, c’est
l’hémisphère qui a l’information qui « appelle » l’autre et ouvre la
canal de communication. Si celui-ci n’appelle pas la communication ne se fait
pas. Je vois deux causes possibles à ce non appel : le premier concerne
les situations de stress. En cas d’attaque et de danger le cerveau a appris à
se « réfugier » dans l’hémisphère prépondérant, les communications
internes sont plus rapides entre les différentes aires et l’importance étant
donnée aux muscles pour fuir ou combattre, la réponse ancestrale au stress a
fait le choix de l’économie du travail intellectuel : pas de raisonnement
avec analyse détaillée et vision globale du problème ! Seule la réaction
spontanée compte. La 2ème cause de non communication est un
déséquilibre important de la gestion d’un hémisphère sur l’autre, et le
développement asymétrique de compétences
liées à celui-ci. Toutes ces compétences poussant progressivement l’hémisphère
à s’isoler comme dans le cas du développement d’un langage personnel
incompréhensible aux autres. Dans le cas Noémie la connectivité du corps
calleux n’est pas en cause, de nombreux travaux ont montré que celle-ci est
fortement héréditaire. Les parents de Noémie sont sportifs et ont d’évidence un excellent capital dans ce
domaine.
Dans
un premier temps, le travail de rééducation a été de rééquilibrer le
fonctionnement des deux hémisphères. De leur apprendre à fonctionner
simultanément et à collaborer. Je détaillerai celui-ci dans un autre article.
Surtout le 2ème point était de mettre de la concentration dans les activités. Cette
rééducation s’est établie sur deux
semaines d’exercices matins et soir.
Que
ne fut pas ma surprise de voir lors de la 2ème séance de coaching, une
petite fille attentive, concentrée et motivée qui est restée assise pendant 80 minutes ! (bien sûr avec quelques
poses pour dessiner …)
La
rééducation sur la lecture pour Noémie passe en premier par l’activation de
l’œil gauche qui est en lien direct avec le module de lecture de son HD. La
lecture avec un bandeau sur l’œil droit est la solution de départ, puis avec
l’usage le simple fait de tourner la tête suffit à condition de toujours placer
le livre de lecture légèrement plus prêt de l’œil gauche pour Noémie. Il est
impératif de bloquer le travail de l’œil droit qui pour rejoindre la boîte aux
mots nécessite un transit par le corps calleux, puis un retour dans l’HG pour
le sens de la phrase. Soit le double du temps. De plus la mémorisation des
phonèmes (bra, bre, bri, bro, bru par exemple) sera plus longue et plus
fastidieuse.
Pour
tous les enfants qui débutent la lecture, le repérage de l’œil lecteur est
indispensable mais surtout il s’agit de découvrir dans quelle configuration de
schéma (1), (2), (3) ou (4) se positionne l’enfant. Reconnaître la latéralité
est simple mais quelques tests rapides pour déterminer plus facilement la
position de l’HD seraient utiles aux enseignants ou parents dans cet exercice
si délicat qu’est la lecture.
Ici
pour cet autre enfant, c’est l’œil droit qui est lecteur, il est mobile, la
tête se tourne parfois un peu pour que l’œil capte mieux le mot ou le phonème.
L’œil gauche accompagne.
Commentaire et ressources :
*
Noémie : le prénom a été changé. Cette petite fille est toujours en CE1.
Elle fait l’attention de nombreux personnels de santé.
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